San Juan et Culebra

On a décidé de profiter des dernières journées de Catherine avec nous pour visiter un peu San Juan et ses environs. On avait même décidé de louer une voiture pour explorer un peu Porto Rico à l’extérieur de la capitale. On a commencé notre visite par un tour dans l’incontournable Vieux San Juan, que l’on pourrait comparer à l’attrait du Vieux-Québec. Fortifications datant des années 1500, bâtiments à l’architecture coloniale espagnole préservée, rues pavées, ornements de mosaïques, grands arbres… et naturellement beaucoup de touristes avec les gigantesques bateaux de croisière accostés au port. N’empêche, c’était vraiment magnifique et on a beaucoup apprécié notre balade, qu’on a terminé par la dégustation d’un traditionnel piña colada (sans alcool pour les enfants). 

Les fortifications du Vieux San Juan et la vue magnifique sur la baie

Nos plans de visite ont toutefois été contrecarrés par Achille qui est tombé malade. Depuis le soir de notre arrivée, il se plaint d’un mal d’oreille et il est constamment fatigué. On espérait s’en sortir avec des gouttes, mais il a commencé à avoir une forte fièvre. Il fallait aller consulter. Appel aux assurances avant de se présenter à une clinique médicale. Heureusement que ce n’était pas une urgence car s’il s’était agit d’une crise cardiaque, je crois que la personne serait décédée avant… on nous réfère à l’hôpital le plus proche. La voiture, ce jour-là, a donc servi à amener Achille à l’hôpital. Avant notre départ, notre médecin de famille nous avait prescrits différents antibiotiques à spectre large pour notre voyage. On aurait pu bien-sûr piger dans notre trousse de premiers soins, mais on venait de passer 5 jours en mer et on voulait justement garder notre provision de médicaments pour ces situations d’urgence où on n’aurait pas accès à une assistance médicale.

Entre-temps, nous avions décidé de rester deux jours de plus à la marina pour faciliter nos déplacements d’ici le départ de Catherine, surtout avec Achille qui n’allait pas du tout. Mais on nous dit que notre place est réservée par un autre bateau, on doit quitter aujourd’hui. Zut! Catherine et moi passont l’essentiel de notre journée à essayer de trouver une autre place à quai. Comme on n’avait pas de téléphone, on s’est rendus à pied à la marina juste à côté (qui est à 30 secondes en bateau, mais 10 minutes à pied). La personne à la guérite parlait uniquement espagnol et on essayait de lui faire comprendre qu’on voulait simplement se rendre au bureau de la marina pour voir s’il y avait de la place. Catherine a sauvé la mise avec ses rudiments d’espagnol qui ont été très utiles dans la situation. Mes cours au Cégep, 25 ans plus tôt, étaient rendus un peu loin dans mon cerveau… Mais peine perdue, il n’y avait de la place nulle part. 

Un immense iguane rayé rencontré au détour d'une promenade, qui a pris la pose juste pour nous.

On a marché jusqu’à la plage la plus proche, Catherine voulait vérifier les conditions de surf pour voir si elle allait se lancer sur les flots avec une planche. La mer semblait un peu extrême et une visite à la boutique de surf un peu plus loin a confirmé que l’endroit est un peu difficile. On lui conseille toutefois un autre lieu, près de l’aéroport, qui loue des planches de surf sur place et où elle trouvera son compte. Sur notre chemin du retour, nous faisons un arrêt à la plage à côté pour une petite saucette, histoire de se rafraîchir avant de retourner au bateau. Catherine fait justement la rencontre de surfeurs qui sont rentrés à la plage après s’être fait ramasser bien comme il faut par les vagues. 

Daniel rentre au bateau en début d’après-midi avec Achille qui a une otite carabinée. On regrette d’avoir attendu 3 jours avant d’aller consulter… À force de supplications, la marina a pitié de nous avec notre petit garçon malade et Daniel réussit à nous avoir une autre nuit à quai. C’est la fin de la journée, mais Catherine pourra profiter d’un 2h de surf avant la tombée de la nuit. Ulysse et Daniel vont aussi faire un tour dans les vagues pour faire un peu de body surf pendant que je reste avec Achille, allongé sur une chaise longue. Ulysse a la piqûre! Il adore se laisser glisser sur les vagues, même s’il fait parfois des pirouettes dans l’eau!

Le lendemain, le plan était de sortir de la ville pour aller faire un sentier de randonnée le matin et de retourner ensuite à la plage faire du surf en après-midi. On était ambitieux! Pendant que Daniel fait le changement d’huile du moteur, Catherine nous trouve un endroit facile pour aller se promener avec les gars, surtout avec Achille qui ne va pas encore très bien. Le temps d’aller se mettre à l’ancre dans la baie (car il a bien fallut quitter la marina) il était déjà tard quand on a quitté la ville. Qui plus est, on était pris dans le trafic… le trajet vers le parc El Yunge, qui devait prendre 40 minutes, en a pris environ 1h20… J’avais apporté plein de collations en prévision qu’on allait dîner tard, en s’arrêtant dans un resto après notre randonnée, mais l’heure du repas allait être plus tard que prévue. On profite d’un petit kiosque de fruits sur le bord de la route pour compléter notre stock de collations et acheter des bananes, des mangues et des avocats. (Depuis notre arrivée, les bananes de Porto Rico ont remporté le titre de meilleures bananes du monde.) 

Les paysages montagneux et la végétation luxuriante de Porto Rico

En arrivant dans le parc national, les enfants étaient émerveillés par la végétation luxuriante de la forêt tropicale. Après les paysages plats et arides (et un peu fades il faut le dire) des Bahamas, cette nature abondante de verdure à travers les montagnes était tout simplement magnifique. Catherine avait déniché un sentier qui se terminait par une rivière avec un bassin pour se baigner. La marche était courte, mais très agréable sous les grands arbres et les fougères géantes. C’était la vraie jungle (le parc portait bien son nom), un véritable paradis pour les gars. On ne s’est pas fait prier pour sauter à l’eau en arrivant au bout. La baignade dans l’eau douce (notre première du voyage!) était un pur bonheur, surtout que l’eau était fraîche, ça faisait du bien dans cette chaleur! Au retour de la randonnée, on décide de modifier notre horaire (chargé) de la journée et de profiter d’être venu jusqu’ici pour en profiter un peu plus. C’est déjà le milieu de l’après-midi mais le dîner attendra encore un peu. Nous n’avons pas le temps de faire d’autres sentiers, plus longs et difficiles, mais juste se promener en voiture à travers les routes du parc dans la montagne en vaut la peine. On s’arrête souvent pour profiter des nombreux points de vue. 

Sur le chemin du retour, on a épuisé notre stock de collations et c’est la crise : Ulysse a faim. On a un peu trop tiré l’élastique, le pauvre n’en peut plus d’attendre. On essaie de trouver un resto dans les environs, mais il n’y a rien d’ouvert dans le coin. Bon, ça devra attendre à San Juan. Une erreur dans l’embranchement d’une sortie nous fait prendre une autre route pour rentrer, à travers des quartiers où l’on croise la vie quotidienne du pays. C’est beaucoup plus intéressant que l’autoroute! Et puis enfin on croise une petite cantine sur le bord de la route. Un vrai endroit où les locaux s’arrêtent. Une toute petite bicoque où on commande au comptoir, avec des tables et des chaises en plastique à côté. Très pittoresque! C’est parfait pour nous et nos estomacs affamés. Alors que Daniel et moi optons pour la salade de crevettes, Catherine et Ulysse choisissent l’assiette avec le poisson complet. C’est la première fois qu’on lui sert un poisson entier, qu’il doit décortiquer pour enlever les arêtes. Il adore! Et comme il est affamé, il dévore son énorme assiette. C’est à cet endroit que les gars découvrent l’eau de coco, en buvant directement dans la noix qui est ouverte à la machette devant eux. (Par contre, ils n’ont pas du tout aimé!) On goûte aussi à des galettes de bananes plantains frites, qui font l’unanimité. Le seul bémol, c’est que nous sommes attaqués par des puces de sable qui sortent justement à cette heure, à la tombée du jour. Malgré l’insecticide que nous appliquons sur nos jambes, nous sommes complètement dévorés. Je portais ce jour-là des shorts courts et évasés… j’ai eu des piqûres jusqu’au ras des fesses! Je me suis retrouvée avec d’énormes plaques rouges sur toutes les jambes, ça me piquait sans bon sens et je me grattais sans arrêt. Même la calamine que j’appliquais n’arrivait pas à venir à bout de mon urticaire…

Pour sa dernière journée, avant de se rendre à l’aéroport à midi, Catherine souhaitait retourner faire du surf, ce qu’on n’avait pas pu faire la veille finalement. Daniel voulait profiter des dernières heures où on avait la voiture pour aller faire une grosse épicerie avant notre départ pour l’île de Culebra, où il n’y a qu’une petite supérette pour se réapprovisionner. Il part tôt, mais pas suffisamment. Nous sommes donc coincés au bateau en plein milieu de la baie en attendant son retour et en regardant les heures s’écouler. Il devient bientôt évident que Catherine n’aura pas le temps d’aller faire du surf avant de prendre son avion. Ça termine pas mal des vacances en queue de poisson… Dès le retour de Daniel, il part en coup de vent avec les enfants et Catherine pour faire une courte escale à la plage avant de la reconduire à l’aéroport. 

Au revoir Catherine!
 

Je reste seule au bateau et c’est là que je réalise que le bateau semble avoir bougé et que le voilier voisin semble beaucoup plus proche qu’avant. Un coup d’œil à la tablette et à notre trace sur l’eau m’indique que j’ai bien raison : l’ancre a glissé. Pendant un moment, elle semble s’être raccrochée et on ne bouge plus. Mais ça ne dure qu’une quinzaine de minutes. On recule. Je ne sais pas vraiment quoi faire dans la situation, mais je pars le moteur pour pouvoir réagir rapidement si jamais on est pour accrocher un autre bateau. Je m’avance vers l’ancre pour m’éloigner du voilier voisin, dans l’espoir que La Vallée du Vent gardera cette position quelques temps, mais non. Je n’ai jamais remonté l’ancre seule, je ne sais pas trop comment je peux m’y prendre pour lever l’ancre sans personne à la barre, ni où aller pour la jeter ailleurs dans la baie. J’appelle la marina sur la VHF pour voir s’ils peuvent m’envoyer de l’aide. Aucune réponse. Puis je vois quelqu’un passer en annexe assez près du bateau pour que je puisse l’interpeler et lui demander un coup de main. Je lui explique la situation et je lui demande s’il peut m’aider à remonter l’ancre pendant que je suis à la barre. Il monte à bord et commence à crinquer la chaîne de l’ancre. On ne la remonte pas complètement. En raccourcissant notre longueur de chaîne, il nous a éloigné des autres bateaux et il pense que c’est suffisant. J’aurais préféré remonter l’ancre au complet et aller la jeter ailleurs, mais comme je ne sais pas où exactement et comme je suis mal placée pour exiger quoi que ce soit alors qu’une personne vient gentiment m’aider, je n’insiste pas. J’apprends qu’il s’appelle Raymond et il vit à bord de son catamaran depuis 7 ans, avec sa femme et ses jumeaux qui ont maintenant 4 ans. On fait des rencontres intéressantes dans ce genre de circonstances! J’apprends aussi que le voilier que l’on menace d’aller cogner n’a pas bougé depuis l’ouragan Maria en 2017 (il a effectivement l’air abandonné et en piteux état) donc de ne pas trop m’inquiéter de le heurter, personne ne viendra me réclamer des assurances. Quand même, je préfère éviter la collision, même si avec deux bateaux à l’arrêt, ça ne risque pas d’être très grave et de causer autre chose que des égratignures. L’ancre semble tenir bon, mais je me tiens sur le qui-vive. 

Lorsque Daniel est enfin de retour au bateau (quel soulagement), il voit que l’ancre a glissé, mais comme on se prépare à partir, on laisse comme ça jusqu’au moment de lever l’ancre pour de bon. En raccourcissant la chaîne, on a toutefois aussi diminué la tenue de l’ancre (le poids de la chaîne aide à la garder enfoncée) et on continue à déraper. Lorsqu’on est enfin prêts à partir, notre bateau est doucement accoté sur le voisin. Je mets une défense entre les deux coques pour éviter les égratignures. Avec toutes nos manœuvres, la chaîne de l’ancre est toute entortillée et on a un mal fou à la remonter! Après 30 minutes, ça y est, on navigue en direction de Culebra!

La navigation vers Culebra était d’une durée d’environ 12h. Arriver de nuit dans un nouvel endroit n’est jamais évident, mais la baie où on allait s’ancrer était facile d’accès, ce n’était donc pas trop stressant. Tout de même, en arrivant à 2h du matin, il nous a fallu zigzaguer entre de nombreux voiliers à l’ancre, certains bien visibles grâce à leur lumière de mât, certains… pas du tout. Je me tenais à la proue du bateau avec la lampe de poche pour éclairer les environs et nous assurer qu’on ne ferait pas de collision. On s’est frayé un chemin jusqu’au fond de la baie et c’est moi qui ai jeté l’ancre. Je ne l’avais fait que très rarement depuis notre départ et toujours avec Daniel, dans des conditions sans vent qui permettaient que l’on soit tous les deux à l’avant. Il était grand temps que j’apprenne à me débrouiller davantage avec l’ancre. On avait l’air bien accrochés et on ne s’est pas fait prier pour aller dormir.

Le lendemain matin, on découvre le paysage d’une jolie petite baie entourée de montagnes. Nous sommes une vingtaine de bateaux ancrés, surtout des voiliers. Après les ancrages surpeuplés, les gros yachts et les gigantesques bateaux de croisière dans les Bahamas et à Porto Rico, l’endroit est très tranquille. On descend à terre pour découvrir l’unique petite ville de l’île, qui entoure la baie. Il n’y a aucun gros hôtel à Culebra, seulement des gîtes, le flot de touristes y est donc beaucoup plus modéré. On apprécie l’ambiance décontractée et conviviale, les jolies rues où il n’y a presque pas de circulation automobile. Daniel a visité plusieurs fois Culebra dans le passé, c’était une de ses destinations de prédilection. Y arriver en voilier était un de ses rêves et on y était enfin! La balade à pied sur l’île nous a permis de trouver d’où partaient les taxis collectifs pour se rendre à Flamenco Beach, notre sortie prévue pour le lendemain. Pour se rafraîchir en cette chaude journée, on s’arrête à la petite épicerie pour s’acheter des cornets de crème glacée et des boissons gazeuses car on meurt de soif. C’est là qu’on découvre le Fanta Ananas, qui deviendra une des boissons favorites des gars dans les Caraïbes, après le Ginger Ale quand on était en Nouvelle-Écosse et aux États-Unis. C’est la première nouvelle habitude que l’on adopte dans notre mode de vie carabéen.

Vestige de la 2e guerre mondiale sur les berges de Culebra

Le lendemain matin, tel que prévu, direction Flamenco Beach, considérée comme l’une des 10 plus belles plages au monde. Le taxi collectif n’est pas donné. Pour 4 personnes, ça nous coûte 20$ US. (Tching$). En arrivant à la plage, on a la mauvaise surprise d’apprendre que la baignade y est interdite en ce moment car la mer est trop agitée. Tu parles d’une déception pour les enfants! Il y a un petit sentier juste à côté qui mène à une autre plage et on décide de faire l’excursion pour voir à quoi elle ressemble. La marche dans la végétation locale d’une petite colline est très agréable. On y croise de nombreux bernards-l’ermite dans leur coquille, on ne savait pas que ça vivait si loin hors de l’eau! En arrivant à la plage, le paysage est charmant, mais elle est rocailleuse et les vagues nous fouettent avec des cailloux. Bon ce n’est pas ici qu’on va se baigner non plus. On en profite pour pique-niquer tranquille avant de remonter le sentier jusqu’à l’entrée de Flamenco Beach. Avant de capituler pour la journée, on redemande si on peut aller se baigner. Hourra! La plage est ouverte! On paie l’entrée (8$ US. Tching$) et on va se promener sur la grande étendue de sable blond qui se profile devant nous. On passe l’après-midi à jouer dans les vagues, qui ont eu le temps de diminuer depuis le matin mais qui restent encore bien formées. Ulysse, qui a pris la piqûre au body surf, est aux anges. On doit tout de même rester près du rivage car le courant est très fort. Pendant qu’on y était, deux personnes ont dû être secourues par des sauveteurs car elles étaient incapables de regagner la plage. Disons qu’on surveillait les gars de près. C’est le cœur heureux que nous sommes rentrés, éreintés par cette journée dans l’eau. (Trajet de retour, un autre 20$ US. Tching$) On a terminé notre journée au Dinghy Dock, un restaurant dont la terrasse donne sur la baie et où on peut arriver directement en annexe, s’amarrer au quai et juste aller s’asseoir à une table. Génial! On a mangé des spécialités locales, du mahi-mahi, des beignets de bananes plantains et une pastillones, un genre de lasagne à la viande dont les pâtes sont remplacées par des bananes plantains. De quoi être dans l’ambiance de l’endroit!

La magnifique Flamenco Beach. Je vous l'assure, la photo ne rend pas hommage à l'endroit.
 

Même si Ulysse nous a supplié de retourner à Flamenco Beach, à 50$ la journée, il était évident qu’on n’avait pas le budget de faire cette sortie plus d’une fois. On s’est dirigé vers une plage toute proche, où on pouvait se rendre à pied. Après la flamboyante Flamenco, Playa Dátiles était beaucoup plus modeste et on y retrouvait surtout des locaux. L’eau était calme et peu profonde, c’était parfait pour les gars qui pouvaient jouer dans l’eau sans leur gilet de sauvetage pendant que papa et maman se reposaient en-dessous d’un arbre (toujours en gardant un œil bien sûr).

 

La petite Playa Dátiles bordée de grands arbres.

On était devant un dilemme. On avait prévu rester à Culebra plus longtemps, mais de très forts vents étaient annoncés pour toute la semaine suivante. Si on ne partait pas le lendemain pour Saint-Martin, on ne savait pas quand serait notre prochaine fenêtre météo. Notre plus grand problème était notre réserve d’eau. Il n’y avait nulle part où on pouvait remplir nos réservoirs. On risquait d’en manquer avant d’arriver à Saint-Martin si on était retenus ici plus d’une semaine. On a aussi réalisé qu’on avait fait le tour de l’île et que c’était bien de partir maintenant, avant d’être lassé. Notre aventure portoricaine se terminait, on quittait le paradis de Culebra, mais une autre porte s’ouvrait vers de nouveaux horizons. C’était le temps de lever l’ancre.

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